C’est l’histoire d’un homme qui se retire dans la petite maison au fond de son jardin. Au gré des saisons, avec le temps qui passe, il s’abandonne aux voyages, ces voyages que l’on fait autour d’une chambre, en compagnie de souvenirs et d’objets amis. Ici, une lanterne sourde anime, de sa fragile lumière, les mystères d’une épopée africaine. Là, une toile peinte claque comme la voile d’un navire sous grand vent, et appelle mers et océans. Ici, des photos jaunies de sauvages indigènes interrogent ce désir de paradis lointains, alors que là, le dessin d’une carte laisse deviner les frontières d’un pays improbable, pays imaginaire où l’homme, dans la petite maison, déambule et se promène, et dont la réalité a pour lui les attraits de ce que l’illusion a de plus vrai. L’homme, cinéaste, tout en marchant, rêve et rêve de ces films qu’il aurait pu faire, qui auraient pu naître de ces lieux qu’il parcourt et qui l’habitent et le façonnent, des films qui seraient autant d’histoires, de regards qui, se cherchant, se trouveraient et qui, se mélangeant, se complèteraient en un gigantesque puzzle où chacun à sa manière serait alors comme la pierre de touche d’un film qui les contiendrait tous. Et dans ce jeu des récits qui s’emboîtent comme les éléments gigognes d’un univers en pleine fabrication, dans cette Babel de vies singulières où se croisent des destins impossibles et pourtant véridiques, Eric Pauwels a mis en scène le film fabuleux dont rêve cet homme. S’inspirant de la stratégie de l’araignée, et gardant en mémoire la chorégraphie d’un vol d’étourneaux, Eric Pauwels construit son film comme une immense toile spiralée où les différents éléments qui le composent se répètent en un chant sériel à l’effet hypnotique, nous entraînant, de résonance en résonance, vers ce lieu labyrinthique où la force du rêve et la puissance de l’imaginaire rendent inefficaces les frontières, aberrantes limites, impossibles les distinctions entre rêve et réalité.